Page 24 - Marsanne Résidence comtale
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MARSANNE VILLE COMTALE MÉDIÉVALE
Au contraire, le comte Eustache peut être identifié sans hésitation avec l’évêque de
Valence du même nom, grâce à une charte en latin de l’abbaye cistercienne de Léoncel,
qui le nomme Eustachius episcopus et comes Valentinensis, Eustache évêque et comte de
Valentinois. Évêque de Valence dès 1107, Eustache fut un personnage étonnant, jouant un rôle
politique important, jusqu’au jugement d’un concile tenu à Pise en 1135 qui le déposa de son
siège pour intempérance ! Il s’y maintint contre l’avis de Rome, puisqu’il était comte, titre qu’il
portait lorsqu’il cautionna en 1138, l’acte de son frère Guillaume, alors haut dignitaire religieux
valentinois. Il fut remplacé en 1141, par un saint homme, Jean, l’abbé cistercien de Bonnevaux.
Le frère de l’évêque Eustache, le prévôt de Valence Guillaume, monta ensuite sur le
siège épiscopal de Viviers. Soutenu en 1147 par un privilège de l’empereur Conrad, il l’occupa
au moins jusqu’en 1154. Le diplôme impérial fait état d’une parenté entre l’empereur et
l’évêque : Conradus Dei gratia Romanorum rex Vuillehelmo dilecto consanguineo suo, urbis
Vivariensis episcopo.
On ignore l’origine de ces frères évêques, Eustache et Guillaume, mais coïncidence
remarquable, le dernier comte de Forez, Guillaume, au début du XII siècle, a eu deux fils
e
dénommés Guillaume et Eustache, et après eux, le titre de comte de Forez passa à leur
cousin germain, le fils de leur tante paternelle, mariée dans la famille des comtes d’Albon.
Guillaume de Poitiers, comte de Valentinois et les hospitaliers
L’ordre religieux militaire des chevaliers de l’Hôpital de Saint-Jean-de-Jérusalem, fut
installé à Cléon d’Andran par le même Guillaume, prévôt de Valence, puis évêque de Viviers,
peu avant sa disparition en 1154, comme le prouve un acte daté de 1164, dont quelques
phrases ont été consignées par le marquis de Ripert-Montclar :
« Ego Willelmus Pictaviensis et ego Eustachius, frater Wilelmi, donavimus et laudavimus
et concessimus et confirmavimus hoc quod patruus noster Wilelmus, Vivariensis episcopus et
prepositus Valentinus, in extremis positus donavit … Deo et fratribus hospitalis Iherusalem,
videlicet Clivium cum mandamento. »
En d’autres termes, cette donation de Cléon d’Andran (Clivium) et de son territoire
que Guillaume avait faite, peu avant de mourir, fut confirmée par ses neveux, Guillaume de
Poitiers et son frère Eustache. De plus, l’évêque de Valence, Odon l’approuva et l’authentifia.
Cet acte établit les liens familiaux qui existaient entre les frères Guillaume et Eustache,
tous deux évêques, mais de rang comtal, et leurs deux neveux homonymes, Guillaume (de
Poitiers) et son frère Eustache qu’un autre acte nomme Eustache de Marsanne et que l’on
compte parmi les lettrés, les troubadours.
Guillaume de Poitiers, s’intitulait comte de Valentinois dans l’hommage de 1163 qu’il
rendit à l’évêque de Die, pour ses châteaux de Suze et de Gigors, situés dans la vallée de
la Gervanne, à l’est du Valentinois. La formule plus complète employée dans la sauvegarde
qu’il accorda aux moines cisterciens de Léoncel est sans équivoque : « moi, Guillaume, du
nom de Poitiers, comte de Valentinois, par devoir et par consécration divine », W(illelmus)
Pictaviensis cognomine, officio vero Valentinus comes et divina ordinatione.
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