GÉNISSIEU (Jean-Joseph-Victor)
GÉNISSIEU (Jean-Joseph-Victor)), conventionnel que Rochas, qui l'a confondu avec son frère, fait naître le 2 juin 1751, naquit en réalité le 29 octobre 1749, à Chabeuil, de Joseph Génissieu, notaire et procureur, et de Dominique Faure. Avocat à Grenoble quand éclata la Révolution, il assista naturellement à l'assemblée de Vizille ; puis, ainsi qu'il s'en vanta un jour à la tribune, " fut l'instituteur de la Société populaire de Grenoble ", ce {372}qui lui valut d'être nommé tout à la fois administrateur du district de cette ville et juge au tribunal de ce district, en 1790. Elu député du département de l'Isère à la Convention, au mois de septembre 1792, il fut un des membres les plus importants de cette assemblée et avec cela un révolutionnaire des plus ardents, bien que ne siègeant pas sur les bancs de la Montagne ; car, indépendamment de ce qu'il vota la mort de Louis XVI sans appel ni sursis, il n'est guère de mesure violente à laquelle il ne se soit associé par sa parole ou son vote, lorsqu'il n'en fut pas le promoteur. Ainsi demanda-t-il, le 16 décembre 1792, que tous les membres de la famille royale, y compris le duc d'Orléans, fussent bannis ; le 26 mars, que l'on désarmât tous les ci-devant nobles ; sept jours après, que l'on défendît de jouer la tragédie de Mérope, parce qu'on y voit " une reine en deuil qui pleure son mari " ; puis (18 avril), que l'on demandât compte à Kellermann et au Conseil exécutif de la nomination de " francs aristocrates " comme officiers, et, le 22 juillet, que l'emprunt forcé d'un milliard, voté le mois précédent, ne pesât que sur les capitalistes. Le 5 juillet, il faisait décréter que les prêtres et les nobles qui faisaient partie des armées vendéennes seraient considérés comme des chefs de brigands ; après quoi il ne cessa de préconiser les plus rigoureuses mesures contre les émigrés, tout en se montrant cependant moins sévère pour les prêtres que pour les nobles, et s'élevant maintes fois contre les courtisans de la populace et les fauteurs de désordres.
Chargé, après le 9 thermidor, d'examiner la conduite du tribunal révolutionnaire de Brest, le rapport qu'il lut à la tribune de la Convention, le 16 prairial an III (4 juin 1795), est une exposition froide et impartiale de faits souvent épouvantables, et l'on en peut dire autant de ses rapports sur la conduite des députés Dupin et Chaudron-Rousseau, justement accusés de grands méfaits. Bien plus, il est l'auteur de la loi du 28 thermidor an III, déclarant non avenus, sauf revision, tous les jugements révolutionnairement rendus depuis le 10 mars 1793, et, tout en ne désarmant pas vis-à-vis des émigrés, il demanda, le 18 fructidor, que Talleyrand fût rayé de la liste, parce qu'il n'était pas plus coupable que le général de Montesquiou, à qui l'on avait accordé cette faveur, malgré lui Génissieu. Quatre jours après, il faisait voter une loi restituant leurs biens aux prêtres déportés ; par contre, il est également l'auteur de la loi du 5e jour complémentaire an III, qui déclare incapables de remplir aucune fonction publique les prêtres insermentés et les parents d'émigrés.
Devenu président de la Convention, le 16 vendémiaire (5 octobre 1795), Génissieu eut toujours l'attitude d'un homme qui avait réellement souci de la justice, quand la passion politique ne l'aveuglait pas. On peut s'en convaincre par ce rapprochement : après avoir fait voter une loi permettant aux accusés de récuser leurs juges, dans certaines conditions, il fit déclarer que les parents d'émigrés ne pouvaient être jurés. C'est lui, enfin, qui déclara, le 4 brumaire (26 octobre 1795), que la Convention avait rempli sa mission.
Dans le Conseil des Cinq-Cents, dont il fit ensuite partie, Génissieu ne joua pas un rôle moins important et, là encore, se montra irréconciliable adversaire de ceux qui ne partageaient pas ses opinions politiques.
Ainsi voulut-il que le Journal des patriotes de 1789 fût toujours répandu aux frais de l'Etat, bien qu'il accusât les députés de tripotages financiers parce qu'il n'était pas " chouan ", et, s'opposa-t-il énergiquement ensuite à la validation de l'élection d'un député de la Drôme, Job Aymé, qu'il finit par faire invlaider, comme faisant partie des Compagnons de Jésus, et cela après avoir refusé de rapporter cette élection, parce que sa famille avait été, disait-il, persécutée par Aymé. Le 17 nivôse an IV (6 janvier 1796), il écri{373}vait au Conseil que, consultant plus " son zèle que ses moyens, " il avait accepté le poste de ministre de la justice, et que, s'il ne lui était ainsi plus permis de concourir à la confection des lois qui doivent " amener la prospérité de la république et le bonheur du peuple françois, comme ministre il ne négligeroit rien pour les faire exécuter " ; et, de fait, il adressa presque aussitôt aux " commissaires du Directoire près les tribunaux de département " une circulaire dans laquelle sont signalés quantité d'abus. Mais, comprenant bien vite l'inanité de ses efforts, il donna sa démission au bout de trois mois et fut alors nommé consul de France à Barcelone, poste qu'il refusa pour accepter celui de substitut du commissaire près le Tribunal de cassation (14 germinal an IV). Deux ans plus tard (26 floréal an VI), le Conseil des Cinq-Cents le présentait au Conseil des Anciens, pour une place de directeur, mais on lui préféra Treilhard, et c'est alors que les électeurs de la Seine lui rouvrirent les portes du Conseil des Cinq-Cents, où son action fut encore plus marquante que la précédente fois car il fut élu président le 30 prairial an VII (18 juin 1799). Arrêté le 20 brumaire, pour avoir crié que l'on devrait mettre Bonaparte hors la loi, on trouva ensuite qu'il n'était pas seulement prouvé qu'il se trouvât à St-Cloud quand le futur empereur en chassa les représentants du pays, ce qui le fit relâcher au bout de six heures ; et, témoignage irrécusable de la philosophie avec laquelle il accueillit ce coup de force, quelques jours après il devenait juge au tribunal de la Seine, ce qu'il était encore lorsqu'il mourut, le 27 octobre 1804, du chagrin de voir relever le trône, suivant quelques-uns, laissant une fortune considérable, selon d'autres.
BIBLIOGRAPHIE. - I. Nouvelles observations sur le rapport du premier comité de constitution concernant le pouvoir judiciaire. Grenoble, Cuchet, s.d., in-8º de 78 pp.
II. Compte rendu de l'emploi des sommes qu'il a perçues pour frais de sa mission dans... l'Orne et... la Sarthe (pluv. an III). In-8º de 8 pp.
III. Discours... sur la confiscation (14 floréal). In-8º de 8 pp.
IV. Motion d'ordre sur les divers projets tendant au retirement des assignats (24 floréal, an III). In-8º de 10 pp.
V. Projets de décrets relatifs aux deux lois du 22 germinal et aux émigrés... (floréal an III). In-8º de 6 pp.
VI. Projet de décret sur les exceptions à la loi qui ordonne la restitution des biens confisqués... (prairial an III). In-8º de 8 pp.
VII. Additions ou modifications à faire au projet de constitution avant la lecture définitive... (thermidor an III). In-8º de 4 pp.
VIII. Suite des additions ou modifications proposées... In-4º de 4 pp.
IX. Nº 3 des additions ou modifications proposées... In-8º de 8 pp.
X. Projet de loi sur la police extérieure des cultes. Paris, an III. In-8º de 15 pp.
XI. Rapport et projet de décret sur les récusations péremptoires ou non motivées (vend. an IV). In-8º de 10 pp.
XII. Exposé des motifs qui ont détermine la section du comité de législation chargée de présenter un projet de Code civil, à adopter la partie de travail relative à la prescription. S.d., in-8º de 11 pp.
XIII. Projet de décret sur le mode d'emprunt forcé d'un milliard. S.d., in-8º de 8 pp.
XIV. Projets de résolution présentés (au Conseil des Cinq-Cents), au nom de la Commission relative à la vérification des pouvoirs (frimaire an IV). In-8º de 6 pp.
XV. Discours sur le mode de remplacement aux places vacantes dans le Tribunal de cassation (11 messidor an VI). In-8º de 6 pp.
XVI. Rapport sur les domaines engagés (3 thermidor an VI). In-8º de 30 pp.
XVII. Rapport sur la réclamation du représentant du peuple Sonthonax, inscrit comme émigré (16 thermidor an VI.) In-8º de 12 pp.
XVIII. Rapport sur le bureau de liquidation du passif des émigrés du département de la Seine (7 nivôse an VII). In-8º de 16 pp.
XIX. Discours sur le départ des conscrits du département de l'Isère (18 pluviôse an VII). In-8º de 8 pp.
XX. Rapport au nom de la commission chargée de présenter les moyens d'élever les recettes de l'an 7 au niveau des dépenses (26 germinal an VII). In-8º de 28 pp.
XXI. Second rapport... (25 floréal an VII). In-4º de 32 pp.
XXII. Projets de résolution présentés... au nom de la commission chargée de proposer les moyens de mettre le niveau entre les recettes et les dépenses de l'an 7 (25 floréal an VII). In-8º de 6 pp.
XXIII. Nouvelle rédaction du projet relatif au compte des fruits dus par les co-propriétaires de biens indivis avec les émigrés (4 prairial an VII). In-8º de 8 pp.
{374}XXIV. Projet de résolution... sur l'emprunt (25 messidor an VII). In-8º de 10 pp.
XXV. Discours prononcé à la séance du 26 messidor an 7, anniversaire du 14 juillet. In-8º de 15 pp.
XXVI. Rapport au nom de la commission chargée de proposer la fixation des dépenses du ministère des finances pour l'an 8 (fructidor an VIII). In-8º de 51 pp.
XXVII. Projets de loi faisant suite au rapport... au nom de la commission... In-8º de 6 pp.
#Biogr. Dauph., i, 414. - Bull. d'archéol., xx, 112. - Stat. Isère, iv, 148. - Le Gallois, Dict. des Minist., 314. - Réimpr. du Moniteur. - Etc.
Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901
Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne
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