BOUVIER (André de)
BOUVIER (André de)), sieur de Chabert, fameux capitaine huguenot que Lesdiguières appelait son " frère, compagnon et parfait amy " et que les écrits du temps appellent le capitaine Bouvier de Romans, était en réalité de Curson, où Claude de Bouvier, son aïeul, acquit en 1512 la maison-forte de Chabert, par le fait de son mariage avec Florie d'Arces, à qui elle apparnait. Ayant embrassé le parti de la Réforme en même temps que son frère aîné Raymond de Bouvier, qui périt en défendant Livron, au mois de décembre 1574, il était, dès le printemps de cette année-là, à la tête de 300 hommes avec lesquels il s'empara du château d'Iseron, le 13 avril, ce qui le rendit maître de tout le Royans. Délogé de cette position au mois de juin suivant, il se réfugia dans le Diois, mais pour revenir ensuite et s'emparer du château d'Armieu, d'où le lieutenant général de Gordes ne le délogea, au mois de juillet 1577, que grâce à un siège opiniâtre et à son artillerie. Dix mois après, sur la nouvelle que Lesdiguières s'était entendu avec Maugiron pour l'exécution de la paix de Poitiers, Bouvier s'emparait du Ponten-Royans dont il ne fut chassé qu'à grand'peine, par les habitants aidés de quelques soldats, et, pour tout dire, il commandait plus ou moins depuis cinq ans dans la contrée montagneuse comprise entre l'Isère et le Diois, lorsqu'il tenta d'étendre son action au delà. C'était au printemps de 1580. Les paysans de la Valloire et du Bas-Viennois étant alors depuis un an en état de rébellion ouverte contre la noblesse, à cause de l'augmentation constante des charges publiques, il noua des intelligences avec eux, leur pro{135}mettant son concours ; puis, s'étant facilement emparé du château de Beauvoir, sur la rive gauche de l'Isère, il s'y établit, pour leur donner la main. Sachant cela, les insurgés que pourchassaient les troupes de la noblesse se dirigèrent de son côté, et il y eut même à Moirans une entrevue, à la suite de laquelle 500 paysans l'accompagnèrent à Beauvoir que l'on fortifia en toute hâte. Seulement, comme il ne put pas secourir ensuite ceux qui étaient restés à Moirans, les gentilshommes en firent un effroyable massacre dans ce bourg, le 26 mars. " Il en demoura 900 sur la place ", dit Piémond qui raconte, en outre, que le seigneur de Tournon se vantait d'en avoir " tué, d'une seule espée, dix-sept. "
Trois semaines après, Bouvier était blessé dans une attaque contre les troupes qui occupaient encore les environs de Moirans, et, deux mois plus tard (10 juin), croyant surprendre le château de Quirieu, point stratégique assezimportant sur le Haut-Rhône, il faisait tout d'une traite et de nuit, à la tête de 400 hommes, une dizaine de lieues par des chemins infréquentés. Cette audacieuse expédition ne réussit pas, le gouverneur de Quirieu ayant été prévenu en temps utile, mais n'émut pas moins vivement l'opinion dans la province, si bien que le duc de Mayenne étant arrivé en Dauphiné, avec une armée, au commencement de septembre, son premier soin fut de bloquer les principales places des huguenots dans le Royans, notamment Saint-Quentin où commandait Bouvier. Or, quels que fussent l'audace et le courage de ce dernier, il n'était pas en état de résister, si peu que ce fût, à une armée. Voyant cela, il se rendit donc aux plus honorables conditions, pour aller ensuite au secours de la Mure, dont Mayenne avait commencé le siège. Seulement, il n'y put entrer, et fut condamné à errer pendant quelque temps dans la province, jusqu'à ce qu'enfin les autres chefs du parti huguenot, comprenant à leur tour que la résistance était impossible, le chargèrent, conjointement avec Morges, Blacons et d'autres, de traiter de la paix avec Mayenne ; ce qui eut lieu vers la fin de juillet 1581. Et ce qu'il importe de remarquer, c'est que, tandis que Lesdiguières, par exemple, ne consentit à déposer les armes que par ruse, Bouvier le fit de la meilleure foi du monde, à ce point, qu'ayant découvert, six ou sept mois après, un complot tendant à livrer Grenoble à ses coreligionnaires, il s'empressa de le déjouer en le dénonçant, " sçachant, dit Piémond, le serment de fidélité qu'il avoit presté à Mgr le Duc. " Cette conduite assez rare, surtout à cette époque, lui coûta la vie ; car, une semblable loyauté permettant de croire qu'il porterait les armes contre les huguenots recommençant la guerre civile, deux soldats de la garnison d'Orange l'assassinèrent traîtreusement en 1585, dans une grange aux environs de Saint-Marcellin, par crainte " qu'il ne leur fît beaucoup de mal. "
#Dr. Chevalier, Arm. de Romans, 29. - De Gallier, Essai sur Clérieu, 150, 163, - Mém. de Piémond, édit. Brun-Durand, 18, 76, 99, 104, 138, 154. - Bull. d'archéol., ii, 425. - Etc.
Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901
Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne
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