VESC (Etienne de)
VESC (Etienne de)), baron de Grimaud, favori du roi Charles VIII, que Philippe de Commines, qui l'appelle Etienne de Vers, dit être né à Beaucaire et de petite lignée, tenait incontestablement à la famille du précédent ; il n'y a qu'à voir combien il fut mêlé aux affaires les plus intimes de cette famille pour en être convaincu, sans compter qu'il portait les mêmes armoiries. Seulement, comme il y a tout lieu de croire qu'il était un bâtard de Pierre de Vesc, seigneur de Béconne, que ses créanciers dépouillèrent en grande partie de ses biens, vers le milieu du xve siècle, on a ainsi l'explication du dédain avec lequel Commines parle de ce favori de roi, qui finit, dit-on, par être le plus riche seigneur de son temps. Pour ce qui est du lieu de la naissance d'Etienne de Vesc, ce chroniqueur a pu être induit en erreur par ce fait qu'Etienne de Vesc est généralement appelé par ses contemporains : le sénéchal de Beaucaire.
En résumé, nous croyons avec l'abbé Robin, qui s'est plus que personne occupé de la famille de Vesc, que le favori du roi Charles VIII naquit à Béconne ou dans les environs, et qu'il est un des serviteurs que le roi Louis XI s'attacha pendant le séjour qu'il fit en Dauphiné, n'étant encore que Dauphin. En tout cas, ce prince devenu roi, l'ayant pris pour valet de chambre, l'attacha ensuite à la personne de son fils, le futur Charles VIII, et l'on prétend même qu'il l'employa avec avantage dans les négociations qui aboutirent à l'annexion de la Provence à la France ; toutes missions dont Etienne de Vesc s'acquitta si bien, que le vieux roi le récompensa de ses services en le faisant bailli de Meaux et, ce qui est autrement significatif, le chargea, à son lit de mort, de ses dernières recommandations pour son fils. C'était le désigner pour un rôle important sous le règne du " nouveau roy qu'il avoit nourry ", comme dit Philippe de Commines ; et de fait, à peine Charles VIII eut-il pris en main le gouvernement de son royaume, qu'Etienne de Vesc, qui s'était contenté de s'enrichir pendant la régence d'Anne de Beaujeu, devint, coup sur coup, sénéchal de Beaucaire et de Nîmes et premier président de la Chambre des comptes de Paris, c'est-à-dire un des personnages importants du royaume, - à tel point que le pape Innocent VIII, dans les états de qui il avait acquis, cinq ans auparavant (11 décembre 1484), la baronnie de Caromb, ne crut pouvoir moins faire que de lui concéder tous les droits régaliens dans cette baronnie, et que, quatre ans plus tard (1493), Ludovic Sforce ayant envoyé des ambassadeurs à Charles VIII, pour l'engager à faire la conquête du royaume de Naples, c'est à Etienne de Vesc surtout qu'ils s'adressèrent, sachant quelle était son influence sur l'esprit du roi. Enfin, c'est lui qui décida le jeune Charles VIII à entreprendre cette conquête, bien que l'on n'eût alors " ne bons chefs,... ne tentes, ne pavillons ", et si peu d'argent, qu'arrivé à Gênes, il fallut emprunter 100,000 livres à 14 0/0 d'intérêt, pour trois mois, à des banquiers, pour les besoins de l'expédition, - ce qui est d'un grand coupable, si le favori du roi ne vit en cette circonstance que son intérêt ; ce qui est d'un esprit bien aventureux et bien léger, s'il eut en vue la gloire de son maître, comme il faut le croire. Malgré cela, cette expédition ne fut en quelque sorte qu'une marche triomphale pour le roi de France, jusqu'à Naples qui résista bien un peu, mais dans lequel Charles VIII n'entra pas moins en {391}vainqueur le 12 mai 1495, ayant à ses côtés Etienne de Vesc, qui portait l'épée de connétable, et qui avait été créé, quelques jours auparavant, grand chambellan du royaume, duc de Nole et d'Avellino, comte d'Ascoli et de Tripalda, - " ce qui n'estoit guère beau, car il ne venoit que de frais estre son valet de chambre, " dit un contemporain scandalisé de cette extraordinaire fortune. Or, fait assez rare, bien que celle-ci dépassât, et de beaucoup, les mérites du personnage, si l'on en croit les historiens et les chroniqueurs de son temps, qui ne parlent guère de lui sans faire allusion à son inexpérience et à son peu de capacité, Etienne de Vesc ne connut pas les brusques et violents retours qu'éprouvèrent d'autres favoris ; car, Charles VIII, qui l'avait nommé gouverneur de Gaëte, aussitôt après la prise de cette place (25 mars 1495), l'ayant chargé, en repartant pour la France, du maniement de tous les deniers de son nouveau royaume, il y eut bien là pour lui, " plus de faix qu'il ne pouvoit ou n'en sceut supporter, " mais il fut, en revanche, " bien affectionné à la garde dudict royaume. " Ses adversaires les plus déclarés sont obligés de le reconnaître ; et c'est pour cela que, de retour de cette expédition de Naples, qu'il avait tant conseillée et dont la fin fut si malheureuse, après avoir eu de si beaux commencements, il retrouva intacte la confiance du roi son maître.
Rentré en France dans les premiers mois de 1496, Etienne de Vesc était, en effet, quelques mois plus tard, un des commissaires du roi près les Etats de Languedoc, et il en fut encore ainsi en 1497. Bien plus, Charles VIII étant mort, son successeur lui continua le même mandat jusqu'à sa mort arrivée en 1500 au plus tard, et non en 1501, comme le disent tous les historiens, attendu que son fils, Jean de Vesc, prêtait hommage, le 3 janvier 1501, pour la terre de Châteauneuf-de-Mazenc, acquise trois ans auparavant par le favori de Charles VIII. Terminons en disant qu'Etienne de Vesc mourut à Caromb, où il avait fait édifier un magnifique château, dévasté en 1792, et qu'il fut inhumé dans l'église paroissiale de ce lieu, où Anne de Courtois, sa femme, fonda, en 1489, un chapitre de six chanoines et où son tombeau en marbre blanc se voit encore derrière un autel.
BIO-BIBLIOGRAPHIE. - Notice biographique et historique de Etienne de Vesc, sénéchal de Beaucaire, pour servir à l'histoire des expéditions d'Italie, par M. de Boislisle. Paris, 1884, in-8º.
#Bull. d'arch., ii, 74. - Barjavel, ii, 466. - Mémoires de Commines, livre 7. - Item. de G. Villeneuve. - Arch. cur. de l'hist. de Fr., i, 169, 361. - Lacroix, L'Arr. de Mont., ii, 70. - Pithon-Curt, iii, 473. - Hist. gén. de Languedoc, viii, 206, 210, 212. - Fornier, Hist. des Alpes-Mar., éd. Guillaume, ii, 460. - Etc.
Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901
Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne
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