JOUBERT (François)
JOUBERT (François)), frère puìné du précédent, né à Valence, le 15 novembre 1534, étudia le droit, prit le grade de docteur en l'université de cette ville et fut d'abord juge des appeaux, autrement dit juge du second degré, dans les terres de l'évêché de Valence ; puis, cette charge ayant été supprimée, il devint juge mage ou bailli épiscopal, du 15 novembre 1568 à 1587, qui est la date de sa mort. Mais ce n'est pas tout ; car, indépendamment de son rôle de magistrat, il fut de très bonne heure un des hommes les plus mêlés aux affaires de sa ville natale. Ainsi il n'avait pas encore vingt ans lorsqu'on le chargea tout à la fois, étant à Paris, de s'assurer des dispositions du nouvel évêque de Valence, Jean de Monlue, à l'endroit de l'université de cette ville, et de recruter quelques professeurs en renom pour cet établissement, - double mission dont il s'acquitta fort bien, à ce que nous apprend une de ses lettres du 4 juin 1554, portant que le prélat est des mieux disposés en faveur de l'Université, qu'il estime être " la plus belle rose " que les Valentinois aient " à leur chapeau ", et qu'il espère obtenir de Ferrerius et de Coras, deux fameux professeurs du temps, qu'ils enseignent alternativement le droit à Valence ; ajoutant qu'en cas de refus, il aura " moyen d'y faire venir M. Goveanus, homme de grand bruict et sçavoir ", ce qui arriva en effet. Il insiste surtout, dans cette lettre, sur ce qu'il faut faire bon accueil au nouvel évèque, conséquemment laisser dormir certain procès pendant au sujet de la leyde et du péage, attendu que ce prélat " homme bien entendu et débonnaire... de grand crédit et pouvoir ", veut être non le seigneur des habitants de Valence, mais leur " bon père et bon amy. " D'où l'on peut conclure que notre jeune homme fut séduit au premier abord par l'habile Monluc. Seulement, il faut remarquer aussi que, même après qu'il fut devenu un des premiers officiers de l'évèque, François Joubert ne craignit pas de rendre ce dernier responsable des troubles que les divisions religieuses amenèrent à Valence, en 1560, disant que tout cela provient " de ceux qui ont ordonné la chière à M. Fillo, auquel il a ouy prescher propos hérétiques, qu'il veut soubstenir. " Et une autre remarque à faire, c'est que, tout en étant un adversaire intraitable des nouvelles idées religieuses, il fut toujours un défenseur résolu de l'Université, soutenant à l'encontre de la municipalité valentinoise, qui en voulait suspendre les cours, parce que des " escoliers s'estoient par le passé meslés parmy les huguenots ", que " la faulte des troubles n'est pas provenue des escoliers ", et qu'on remettrait toutes choses au point, en décidant que " les escoliers qui viendraient après se matriculeroient et jureroient de vivre selon les constitutions de l'esglise catholique, apostolique, romaine et ordonnances royaux sur ce faictes, aultrement seroit défendu aux hostes de les loger. "
{23}C'était le 22 mai 1560, et, dix-huit mois après (2 décembre), notre valentinois se rendait auprès du roi, pour le prier de faire exécuter les édits interdisant l'exercice du culte réformé, voyage d'où il revint le 27 février de l'année suivante, " non sans estre prudemment estonné des misères de ce siècle. "
Enfin, bien qu'il ne le dise pas dans ses mémoires, nous savons qu'il retourna encore à Paris, au mois d'avril 1571, pour obtenir du roi quelque soulagement à propos d'un impôt de 8,000 livres mis sur la ville de Valence. Mais, ce qui nous intéresse bien plus encore, ce sont ses mémoires, qui ont été si souvent cités par Chorier et qui semblaient perdus, lorsqu'ils ont été mis au jour par M. Ed. Maignien ; car on y trouve quantité de renseignements pour l'histoire des guerres dites de religion, que l'on chercherait vainement ailleurs.
Pour ce qui le regarde personnellement, François Joubert y apprend, entre autres choses, que le 6 avril 1569, " arriva dans la ville de Vallence M. Denis Paléologue, prélat grec, archevesque de Rico, venant de Rome et allant en France, qui logea au logis du Mouton et avoit un mandat du Roy aux consuls des villes, pour lui fournir vivres et chevaux pour fere son voyage, car il avoit esté vollé des brigans et avoit esté chassé par les Turcs, de ses terres, et faict prisonnier un an. Et pour ce qu'il estoit procureur général du patriarche de Hiérusalem, avec puissance d'instituer chevalliers du St-Sépulchre, il feist cest honneur au sieur François Joubert, juge de Vallence, de le fere chevallier du Saint-Sépulchre, comme avoit esté sieur Jean Joubert, son père, et lui en bailha lettres patantes, luy mettant la croix d'or de son père au col, laquelle ledict sieur Jean Joubert avoit portée plus de cinquante ans, et après luy bailha l'espée nue en la main, pour deffendre la foy de Jésus-Christ, et luy mit à la main gauche la chandelle ardente, pour servir de lumière. "
De Pernette de Laube, sa femme, François Joubert n'eut qu'une fille appelée Jeanne, qui épousa noble Etienne de Lafont.
Ses Mémoires, qui furent vraisemblablement commencés par son père, puisqu'ils partent de 1512, et que continua jusqu'en 1644 Salomon de Mérez, ont été publiés sous le titre de : Mémoires de divers événements en Dauphiné, notamment pendant les guerres de religion, par M. Edmond Maignien, conservateur de la bibliothèque de Grenoble. Grenoble, 1888, in-16 de 95 pp.
#Arch. Valence, AA, 10 ; BB, 6 et 7. - Guy Allard, Bibl. du Dauph., 132. - Chorier, Hist. gén., ii, 364, 557. - Etc.
Brun-Durand Dictionnaire Biographique de la Drôme 1901
Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme & Les amis du Vieux Marsanne
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